Ecorce de peines à l’Artchipel
le MERCREDI 21 JANVIER 2009
Les peines, l'avilissement, mais aussi le stoïcisme et la conscience sont les liens entre deux époques et deux aires géographiques que décrit le texte fort de D' de Kabal. Il travaille sur notre mémoire avec les derniers instants de l'esclave Jako, "qu'on ne casse pas", attaché à son arbre, après une ultime révolte au beau milieu d'une plantation antillaise. C'est dans la seconde partie, deux siècles plus tard, un discours lucide sur la condition des probables descendants de Jako, reclus dans leurs ghettos du 9-3, en proie à toute stigmatisation... L'esprit de résistance est là, la clairvoyance reste intacte. Les mots sont implacables, martelés, répétés, presque didactiques : "Chaque fois que j'ouvre la bouche, j'entends les voix de nos pères. Chaque fois que je crie, ce sont les cris de nos mères. J'entends les sanglots des nouveaux-nés captifs chaque fois que je pleure. Je vis dans ce monde avec un seul poumon et un pieu planté dans le cur". Dans une mise en scène épurée (aucun accessoire à part une chaise), le danseur Didier Firmin maîtrisant une technique impressionnante de violence contenue capte toutes les énergies. Le rythme est imposé par le slam aux accents graves et bas de D' de Kabal et par les sons spécifiques particulièrement bien intégrés à l'ensemble de Dale : human beat box. Les trois artistes se démultiplient sur scène en tableaux naturels, aucun temps mort, aucun superflu... Emotion : le spectateur reste pétrifié sur son siège.
Il n'y eut que cette seule présentation d'Ecorce de peines à l'Artchipel, ce 17 janvier. Dommage, ce spectacle aurait assurément trouvé son public en différents lieux de la Guadeloupe et de la Martinique pour un partage plus large des peines, des émotions et de la conscience.